Il y a trois disparaissait l’ancien Premier ministre du Sénégal, Habib THIAM, également ancien Président de l’Assemblée Nationale. Cette grande figure de la vie politique sénégalaise a marqué son passage aux affaires par un engagement sans faille, donnant le meilleur de lui-même à chaque étape de son remarquable parcours.
ANCIEN CHAMPION DU 100 MÈTRES
Il réussit dans les années 50 le concours d’entrée à l’ENFOM (cadres africains de haut niveau) avec son ami Abdou Diouf. Sportif accompli, il fut champion de France du 100 m et brillait sur toutes les pistes d’athlétisme face à de redoutables concurrents d’alors dont un certain.. Lionel Jospin. Une amitié solide naissait entre les deux jeunes ténors. Au point que devenus plus tard responsables, ils ont contribué au raffermissement des relations entre Paris et Dakar.
Au plus fort de la crise sénégalo-mauritanienne de 1989, ils avaient contribué à décrisper la situation rendant possible le rapatriement des ressortissants de part et d’autre par un « simple coup de téléphone ». Homme politique habile, il a très vite lu l’intention du premier Président de la République du Sénégal indépendant, Léopold Sédar SENGHOR, d’asseoir des fiefs politiques à l’intérieur du pays. C’est ainsi que lui, le natif de Dakar, a jeté son dévolu sur la contrée de Dagana (terre de ses ancêtres) où il devient un leader attitré. Il écume la région et prend goût aux humeurs du terroir pour comprendre les ressorts sur lesquels se fondent le développement et les progrès.
Cette immersion réussie conduit le Président Senghor à lui confier plus tard le portefeuille du Développement rural. Sa connaissance intime du pays et des hommes, ainsi que les atouts des régions viennent de ce contact noué avec le pays profond. Il avait une haute maitrise des aspects ruraux et organisait avec tact les campagnes agricoles en mobilisant toutes les forces vives.
UN MENTAL DE GAGNEUR
La météo, les sols, les intrants, les eaux (souterraines et de surface), les variétés culturales, la saisonnalité des céréales, les cycles d’évolution des semis, le financement ou la collecte, tout, vraiment tout ce qui touchait au monde agro-industriel ne lui était pas étranger. Il était incollable. De son regard perçant, il fixait son interlocuteur dans un échange franc duquel jaillissait la vérité qui l’aidait toujours à opérer en réduisant les angles d’incertitudes.
Pour avoir gravi tous les échelons politiques, Habib THIAM assuma aussi à divers niveaux des responsabilités de premier plan : député, président de Groupe parlementaire, plusieurs fois Ministre, Premier Ministre et Président de l’Assemblée nationale. Son flair politique le prédisposait à commercer facilement avec toutes les chapelles, tous les foyers religieux dans lesquels il comptait de nombreux amis de valeur. Il a connu des fortunes diverses et des infortunes aussi, ce qui avait forgé en lui un mental de gagneur, par ailleurs résilient dans l’adversité, politique notamment. Il prenait plus tard sa distance avec la politique (non sans lui accorder toute l’attention qu’elle requiert), s’adonnait à l’écriture et la lecture. Il recevait du monde, participait à des colloques de haut niveau et entretenait ses amitiés avec un large spectre d’hommes de pouvoir encore en exercice.
L’ancien Premier ministre savait se taire quand il le fallait. Son silence relevait d’un état d’esprit qui lui conférait de la hauteur. Il tenait à son rang. Plus tard Mamoudou Ibra Kane et Mamadou Ndiaye, le convainquirent de rédiger sa biographie : « Habib THIAM, L’Homme d’Etat ». Le succès de librairie de ce livre ouvrait un nouveau chapitre de sa vie remplie. A sa famille, à ses enfants, dont son ainé Mabousso Thiam, et à sa chère épouse, Anna, ce jour de souvenir ravive la mémoire d’un digne fils du Sénégal.